Autoroute A65 Pau/Langon

Errare humanum est, perseverare diabolicum…

Au fur et à mesure que le temps passe, les évidences sans cesse rappelées par les associations de protection de l’environnement à propos de l’autoroute A65, sont désormais admises d’un nombre croissant de citoyens contribuables, au point que très rares sont aujourd’hui ceux qui osent encore trouver des qualités à cette infrastructure dont la construction après le Grenelle, plus qu’une erreur, aura été une véritable faute.

Mais « très rares » ne signifie pas « aucun »…

En effet, nous avons eu la très désagréable surprise de trouver à la page 8 du compte rendu d’activités 2010 de la DREAL Aquitaine[1] , sous le titre « A65, l’autoroute Grenelle » un article dithyrambique à la gloire de cet équipement haïssable.

Au fur et à mesure que le temps passe, les évidences sans cesse rappelées par les associations de protection de l’environnement à propos de l’autoroute A65, sont désormais admises d’un nombre croissant de citoyens contribuables, au point que très rares sont aujourd’hui ceux qui osent encore trouver des qualités à cette infrastructure dont la construction après le Grenelle, plus qu’une erreur, aura été une véritable faute.

Mais « très rares » ne signifie pas « aucun »…

En effet, nous avons eu la très désagréable surprise de trouver à la page 8 du compte rendu d’activités 2010 de la DREAL Aquitaine[1] , sous le titre «A65, l’autoroute Grenelle» un article dithyrambique à la gloire de cet équipement haïssable.

Truffé de contrevérités à propos de la sécurité, de la protection des riverains, de l’insertion environnementale, de la protection de l’eau et des milieux humides, de la protection des espèces animales et de leur habitat, cet article publié à l’issue de l’année mondiale de la biodiversité, est construit comme une véritable ode à l’A65, au point qu’on se demande si son auteur ne serait pas le service communication de sa société concessionnaire.

Au moment où la courbe d’évolution du trafic routier va s’inverser en raison de la prévisible raréfaction des combustibles fossiles et de l’indispensable lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, au moment où chacun sait que vitesse est synonyme de consommation accrue, les « gains de temps significatifs » sont mis en avant sans états d’âme pour justifier l’autoroute Grenelle.
C’est révélateur !

Bien sûr, l’A65 est présenté par la même occasion comme un « progrès pour la sécurité des usagers », mais l’article oublie de préciser que cette sécurité, toute virtuelle si l’on se réfère au nombre surprenant d’accidents déjà constatés pour un si faible trafic, est réservée à ceux qui peuvent acquitter un des péages les plus chers de France pour une telle distance. En vantant la sécurité des usagers, la DREAL oublie aussi que le muret central de l’A65 n’apporte qu’une illusion de sécurité car il ne s’oppose ni à la traversée des poids lourds, ni même des autos, elle oublie de même la sécurité en cas d’intempéries et les automobilistes en détresse dans l’eau, moteur noyé, alors que la circulation reste possible sur l’ancienne route. Mais elle oublie surtout que les usagers les plus nombreux, sont ceux qui rebutés par le prix prohibitif du péage, continuent à emprunter la route classique rendue plus dangereuse par l’étroitesse des ouvrages de franchissement de la nouvelle autoroute. D’ailleurs si de nombreux accrochages sans trop de gravité ont déjà eu lieu sur les franchissements par les petites routes, le premier accident mortel s’est produit le 4 aout 2011, moins d’un an après l’ouverture, sur une rampe d’accès à un pont franchissant l’A65 à Bernos-Beaulac.

Heureusement que l’A65 a fait l’objet d’un « traitement attentif en matière d’insertion environnementale dès la phase chantier ». Ceux pour qui les bruits, les vibrations et les poussières de chaux du chantier ont été insupportables, l’ont échappé belle, le trafic aurait pu être tel qu’il avait été annoncé pour justifier l’ouvrage, au lieu d’être notoirement insignifiant… Mais quand bien même, quand on a choisi d’habiter au silence et qu’on est devenu riverain malgré soi, le bruit des camions et voitures, même trop rares pour rentabiliser l’infrastructure, est déjà un bruit excessif que rien ne pourra compenser.
Les riverains confrontés aux nuisances du chantier puis à l’exploitation de l’autoroute, apprécieront sans doute la notion de « mesures sans précédent en faveur de la protection du cadre de vie et de l’environnement ».

Alors que de nombreux puits et des sources ont été asséchés tout au long du tracé et que des pompages et des drainages importants d’eaux souterraines ont été effectués en catimini dans le niveau Miocène aux environs de Bazas pour permettre la traversée de zones humides en déblai, on peut apprécier l’efficacité des mesures prises pour la « protection de l’eau et des milieux humides » qui fait la fierté de la DREAL. Idem pour la « protection des espèces animales et de leurs habitats » quand on sait que les premières destructions d’habitats et d’espèces protégées par les défrichements ont eu lieu bien avant que le dossier de demande de dérogations n’ait été déposé. Manifestement les mesures « sans précédent en faveur du cadre de vie et de l’environnement » n’ont pas non plus empêché que les boues de ruissèlement du chantier polluent sévèrement des ruisseaux à écrevisses à pattes blanches dans les Pyrénées Atlantiques. Cet épisode malheureux pour l’image d’un chantier que ses promoteurs disaient exemplaire a d’ailleurs conduit les agents de l’ONEMA[2] à dresser des procès verbaux et les associations à poursuivre en citation directe les responsables de ces pollutions que l’Etat ne semblait pas décidé à faire juger…

Nous noterons aussi que la DREAL ne semble pas être dérangée par le remblai dans le lit majeur du Ciron et qu’elle considère qu’il suffit d’aménager des passages de circulation étroits sous l’ouvrage pour que ces boyaux peu engageants soient utilisés par la faune. On aimerait y croire mais ce n’est pas aussi simple. Les animaux se méfient des passages étroits qui peuvent se révéler des pièges. A part quelques espèces fouisseuses, et encore, il risque là aussi, de ne pas y avoir beaucoup de trafic…

Enfin, il est vrai que des « efforts sans précédent ont été faits pour répondre aux demandes du Conseil National de Protection de la Nature » puisque pour ramener à la raison (d’Etat) les membres les plus influents de cette honorable commission, certains d’entre eux avaient été convoqués individuellement par des conseillers du ministre afin que le dossier du maitre d’ouvrage soit enfin jugé satisfaisant en matière de compensations environnementales et que soit enfin délivré un avis favorable aux destructions d’espèces protégées et de leurs habitats lors de la seconde réunion du Comité Permanent du CNPN…

Nous noterons enfin que l’obligation de « préserver ou reconstituer 1372 hectares d’habitats d’espèces remarquables » est bien entendu présentée comme une réussite alors qu’avant d’être ainsi « sauvés » ces territoires de compensation étaient pour la plupart des territoires intacts et non menacés. En revanche, le chantier de l’autoroute Grenelle aura occasionné la destruction bien réelle de près de 2000 hectares de milieux naturels…

Qu’est-ce qui va compenser la perte du puits de carbone des arbres arrachés, ou encore la fragmentation des territoires et la perte de fonctionnalités des corridors écologiques ? Ça, le compte rendu d’activités 2010 de la DREAL ne le dit pas.

Décidément, le mal ce n’est pas tant faire le mal, mais de dire qu’on fait le bien quand on fait le mal et de s’entêter dans cette posture. En l’occurrence, c’est vanter sans pudeur les mérites d’une infrastructure inutile et désastreuse pour l’environnement quand on a justement parmi ses missions les plus nobles la protection de l’environnement.

Par Vison Foutu,
septembre 2011

[1] Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement, issue de la fusion de la DRE (Direction régionale de l’équipement), de la DIREN (Direction régionale de l’environnement) et de la DRIRE (Direction régionale de l’industrie, de la recherche et de l’environnement).

[2] ONEMA, Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques.

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